Janvier est le moment de l’année où beaucoup de gens prennent des résolutions – pour aussitôt les briser. Dans la majorité des pays occidentaux, faire plus d’exercice est la résolution numéro un. Mais seulement 10 pour cent vont s’y tenir réellement. Or, une façon de persévérer dans ses bonnes intentions est de pouvoir les mesurer.
Et une façon fort simple de le faire est de porter un bracelet connecté, aussi appelé moniteur d’activité ou encore, traqueur d’activité. Dans les faits, presqu’un adulte sur cinq en utilise un.
Les bracelets connectés sont non seulement utiles pour l’activité physique, mais aussi pour toute une panoplie d’informations comme la fréquence cardiaque ou les habitudes de sommeil. Mon équipe de recherche utilise les données de ces appareils avec des capteurs intelligents à domicile pour aider les personnes âgées à vivre de façon sécuritaire et autonome. Nous étudions également les données de ces appareils ainsi que les dossiers médicaux électroniques et les données génomiques pour étudier les causes du diabète gestationnel. De nombreux autres chercheurs utilisent ces moniteurs pour mieux comprendre l’impact des modes de vie sur la santé.
Malheureusement, j’ai constaté dans mes recherches sur l’informatisation des soins de santé que les moniteurs d’activité ne donnent peut-être pas tout le crédit que leurs utilisateurs méritent. Par ailleurs, dans certains cas, la sécurité et la confidentialité des données pourraient être compromises.
Donner du crédit quand il le faut
Les personnes qui utilisent les bracelets connectés sont parfois frustrées par les informations obtenues à la suite de leurs activités, ce qui pousse des utilisateurs à les abandonner. Par exemple, des personnes dont les mouvements de bras sont plus limités que la moyenne nous ont signalé, à mon équipe de recherche et moi-même, que les moniteurs d’activité ne consignent pas leurs activités avec exactitude. Cela peut également se produire chez ceux qui n’ont pas des mouvements « standards », par exemple parce qu’ils se traînent les pieds.
Ce manque de « crédit » est particulièrement notoire pour les personnes qui marchent tout en gardant leurs bras immobiles – avec une poussette ou en tenant un bébé. Les nouvelles mères signalent également des problèmes de précision en ce qui concerne leurs habitudes de sommeil. Lorsqu’elles se réveillent plusieurs fois par nuit, le lendemain matin, l’appareil leur indique qu’elles « dorment légèrement ». Cela peut être frustrant lorsque la nouvelle mère veut utiliser ces données pour négocier avec son partenaire le temps passé avec les enfants ! L’appareil lui crédite plus de sommeil qu’elle n’en obtient réellement.
Ces inexactitudes sont logiques d’un point de vue technique. Lorsqu’un poignet est immobile, comme cela arrive si on circule avec une poussette, le logiciel ne peut pas détecter les changements de mouvement à partir du capteur de l’accéléromètre au poignet. L’appareil recherche les changements de mouvements de haut en bas, d’avant en arrière et d’un côté à l’autre.
Les chercheurs ont également montré que 500 pas ou moins peuvent être enregistrés sans porter l’appareil, ce qui montre que les moniteurs peuvent parfois surcomptabiliser l’activité. Dans le cas de la détection du sommeil, la plupart des gens ne se réveillent pas plusieurs fois par nuit, de sorte que les algorithmes utilisés par les bracelets peuvent rejeter de courtes salves de mouvements.
Les entreprises qui fabriquent les moniteurs d’activité détiennent une propriété intellectuelle sur leur produit. Les algorithmes qui évaluent les mouvements ou le sommeil ne sont pas partagés publiquement. Il n’existe actuellement aucun mécanisme permettant de donner une rétroaction sur ce qui a été détecté. Imaginez qu’une personne puisse appuyer sur un bouton et dire à un moniteur d’activité : « Hey, je me suis réveillé trois fois ce soir ! »
Puisque les gens ne reçoivent pas le crédit qu’ils méritent pour certaines de leurs activités, je m’inquiète du type de données sur le mode de vie que nous, chercheurs, pouvons évaluer avec précision à partir d’un produit porté lors de nos recherches.
Si les moniteurs qui suivent la condition physique introduisent des données inexactes sur les pas et le sommeil dans les algorithmes, alors les gens prendront des décisions relatives à la santé en se basant sur des données inexactes.
Qui possède vos données ?
En général, les consommateurs évaluent les informations qu’ils obtiennent d’un moniteur d’activité en transférant leurs données sur une application. La plupart des gens supposent que lorsqu’ils transfèrent ces données, elles ne sont pas partagées à grande échelle, et certainement pas à l’entreprise qui possède l’appareil ou à l’application. Mais rien n’est moins sûr.
Une entreprise pourrait modifier ses conditions de service – que la plupart ont de la difficulté à comprendre selon plusieurs études – et décider de rendre les données sur leur santé accessibles à des tiers. Par exemple, ces données pourraient être vendues afin d’aider les employeurs à comprendre notre condition physique et notre productivité. Par ailleurs, les compagnies d’assurance pourrait favoriser certains clients ou au contraire, refuser de couvrir certains soins à d’autres. Bien qu’il n’y ait aucune preuve de cette pratique, je crois que les consommateurs doivent savoir que c’est une possibilité réelle dans un avenir pas si lointain.